Non, je ne vais pas faire de la théorie en parlant de la mort assistée. Je vais citer plusieurs situations auxquelles j’étais confronté. En tant que journaliste j’ai tourné un film aux Pays-Bas concernant l’euthanasie, d’autres sur la médecine palliative ou sur la mort dans un hospice. Mais aussi dans le cadre personnel, comme le décès de ma maman et d’un ami proche. Chez les deux derniers nommés, j’ai vécu ce qu’on serait en droit de nommer le harcèlement thérapeutique. Chez ma mère les médecins voulaient en 1995 à Genève la garder en vie, ceci malgré leurs dires qu’il n’y avait plus aucun espoir. Les reins ne fonctionnaient plus ainsi que d’autres organes. Elle était raccordée à une machine qui la maintenait en vie artificiellement. Elle m’avait recommandé de dire au médecin, qu’on la fasse partir naturellement, ce qui n’avait tout d’abord pas été le cas. Elle n’avait laissé aucun écrit à ce sujet. J’insistais auprès des médecins qu’ils la laissent s’endormir. Ce n’est qu’après reçu l’aval de son frère, qu’ils acceptèrent de faire ce pas. C’est dans cette situation que je me suis rendu compte à quel point il était difficile pour un médecin de prendre une telle décision. Je leur en suis reconnaissant. De même chez un ami il y a deux ans, qu’on a gardé en vie après une rupture de l’aorte. Les chirurgiens ont fait trois opérations sachant qu’il avait un cancer généralisé et qu’il n’en avait que pour quelques jours. L’hôpital a encaissé en une semaine plus de 80.000,00 Euros. N’étant pas de la famille, je me suis malgré tout rendu à la clinique, où un médecin supérieur, le chef de service de l’unité, a daigné me voir. Je lui ai dit que j’étais journaliste et que je trouvais scandaleux qu’on le garde en vie dans de telles conditions. Que ce qu’ils faisaient n’était qu’une planche à billets. Le fait est, que deux heures plus tard il était mort.

Lors d’un film que j’ai tourné pour ARTE, j’ai été confronté à la médecine palliative et j’ai bien vu, qu’il était impossible de dire aux patients qu’ils seraient sans douleurs. J’ai vu quelques malades que les médecins n’arrivaient pas à soulager. Depuis que je suis confronté moi-même aux douleurs et que les opiacés qu’on me donne ne font pas l’effet escompté, je peux mieux juger ce qu’il en est. Il est effectivement très difficile de trouver le médicament adéquat, car chacun réagit différemment. J’ai eu une amie sur FB, qui m’a écrit que la morphine ne lui avait fait aucun effet. C’est probablement ce qui a amené, tout au moins en partie, les Pays-Bas et ensuite la Belgique, d’autoriser l’euthanasie, après des examens très sévères. J’ai pu parler à des médecins qui étaient autorisés de donner l’injection létale. Lorsque je leur ai parlé, j’ai vu à quel point ils souffraient de devoir le faire, d’autant plus lorsqu’il s’agit de mineurs. Personne n’est obligé de le faire, mais c’est par conviction qu’ils acceptaient cette charge si lourde. Même si j’avais été un partisan de l’euthanasie, ce que je n’ai jamais été, j’y serais complètement opposé après ces déclarations. Il est impossible à mes yeux, de donner le feu vert à un médecin afin qu’il tue son patient, même s’il y a des raisons de la faire. Je préfère la pratique suisse du suicide, où chacun prend personnellement son destin en main, mais sans impliquer autrui. L’euthanasie me met mal à l’aise, car je pense aux malades mentaux que les nazis ont tué.

pm

http://www.lemonde.fr/sante/article/2017/12/14/la-decision-de-la-cour-de-cassation-sur-la-fin-de-vie-legitime-un-peu-le-suicide-assiste_5229917_1651302.html

Pierre Mathias

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