Le curé n’aura pas l’honneur de recevoir Richard Ferrand dans le confessionnal. Tout se dit publiquement. Les hommes et femmes politiques sont constamment soumis à un contrôle venant de la presse. Leur passé est épluché au mieux. La moindre escapade est citée, qu’elle soit juridiquement répréhensible ou non. Dans le cas du ministre, il s’agit d’une question de loyer entre l’organisation dont il était à la tête avant de devenir député, la Mutuelle de Bretagne, la propriétaire des locaux ayant été sa compagne. Lorsqu’on parle de la moralisation de la vie politique, le Président a raison. Mais il devrait aussi savoir que les personnes concernées sont de plus en plus vulnérables. Il est possible de semer des informations ayant pour but de causer du dommage aux uns ou aux autres. Le fake news est devenu monnaie-courant, ce qui rend les choses encore plus délicates. Avant même qu’une enquête ait pu être réalisée, ceux qu’on veut attaquer sont mis au pilori. Leur défense est fragilisée dès le début, ce qui pourrait être le cas du ministre. Dans son cas les faits sont clairs. Il y a eu amalgame entre la vie professionnelle et celle d’un politicien. Il est difficile dans bien des cas de séparer l’une de l’autre. La nouvelle loi sera très stricte à ce sujet. Il était temps de donner un code limpide aux représentants de l’État et du peuple. Il ne sera plus possible de danser dans deux bals à la fois. Mais si on applique ce principe aux politiciens, il faudrait l’étendre sur toute la population. Ce ne sera probablement pas possible, car cela créerait de la délation, qui à mes yeux est aussi grave que les faits qu’on puisse reprocher aux uns ou aux autres. Avec des médias à la recherche de nouvelles les plus corsées possible, le danger persiste que la société dans laquelle nous vivons, mette de plus en plus sous pression tous ceux qui voudraient jouer un certain rôle publique.

Il ne faut pas ignorer, en rédigeant un tel texte, des effets collatéraux que cela peut occasionner. Édouard Philippe l’a bien compris en montrant de la compréhension envers son collègue du cabinet. Il ne veut pas qu’on place telle ou telle démarche dans le catalogue de la chasse aux sorcières. D’autant plus que dans ce cas bien précis, l’affaire de la location s’est produite avant que Richard Ferrand s’occupe de politique. La presse a besoin de scandales afin d’être prise en considération auprès du public. Plus ils sont sulfureux, plus les ventes marcheront. C’est un fait objectif. Mais il est aussi un instrument très dangereux pour éliminer tous ceux qui ne correspondent pas à ce qu’ils s’imaginent. Tout le dilemme est là. Ceux qui respectent la liberté de la presse et qui militent pour elle, sont parfaitement conscients qu’elle aussi est soumise à des lobbys. Mes collègues devraient se méfier terriblement des informations qu’on leur fait parvenir. Ils doivent être conscients des effets qu’elles entraîneront. Mais attention, je nommerais tout cela de l’auto-censure. Pour avoir vécu des faits similaires, je pars aujourd’hui du point de vue, qu’il vaut mieux dire sans concessions ce qui se passe, que de se taire pour des raisons tactiques. L’affaire Ferrand nous donnera loisir de réfléchir aux effets de telle ou telle information. Mais une chose doit être de mise : l’exactitude d’une recherche.

pm

http://www.lemonde.fr/politique/article/2017/05/30/affaire-ferrand-et-moralisation-de-la-vie-politique-ce-qu-il-faut-retenir-des-annonces-d-edouard-philippe_5136210_823448.html

Pierre Mathias

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