C’est ce que le président Erdoğan a déclaré hier. Je ne veux pas en douter, mais la répression qui a lieu actuellement en Turquie indique le contraire. Également l’assurance qu’il ne s’opposerait pas à la peine de mort si le parlement la réclamait. Pour bien préciser ce que je pense, je ne suis pas en tant que démocrate un partisan d’un putsch militaire. Pourquoi ? Parce qu’il ne représente pas la volonté populaire. On peut critiquer, et il y a lieu de le faire, le régime actuel, mais il a été élu en due et bonne forme. Après l’échec du coup d’État, une majorité au sein de la population, a apporté son soutien à Recep Tayyip Erdoğan. Tous les partis, sauf les Kurdes, ont été invités et se sont rendus à la manifestation de hier après-midi. Comment dans de telles conditions s’opposer de l’extérieur à une « prise en main » du régime ? Cela nous met dans l’embarras. Nous ne pouvons que clamer haut et fort, que nous n’approuvons pas la répression. Ce qui rend la situation encore plus compliquée, c’est le rôle que doit avoir jouer un ancien allié du président, Fethullah Gülen. Cela ressemble à une affaire de famille, où des cousins se livrent une lutte d’influence. Pour ma part je ne sais pas ce qu’il en est exactement. Le prédicateur islamiste n’a sûrement pas « avalé de l’eau-bénite » et n’est pas totalement innocent. Mais de là à poursuivre des milliers de gens et de faire miroiter la menace d’une exécution capitale, me semble démesuré.

Il est clair que bon nombre de politiciens voient d’un œil critique ce qui se passe du côté du Bosphore. Mais de là à rompre les négociations avec Ankara, ne me semble pas être la bonne voie. Cette menace ne fera pas changer l’attitude au maître de la Turquie. Il en prendra aussi peu note que Vladimir Poutine en ce qui concerne les mesures de boycotte. Le Kremlin n’a pas lâché du lest pour autant. Il serait plus habile de repousser aux calendes grecques une admission de la Turquie au sein de l’UE. Mais faire obstruction aux négociations, comme le préconise le Chancelier autrichien, serait peut-être un signal, mais qui risque d’être à nos dépends. En termes d’échec, Erdoğan a fait une belle ouverture qu’il est très difficile de contrer. S’il rompait l’accord au sujet des migrants, nous serions dans le plus grand dilemme. Il en est de même pour le combat contre l’EI. Quoique que nous fassions, nous sommes les perdants. En ne condamnant pas d’une manière absolue ce qui se passe actuellement, nous perdons la face. Dans un tel cas il serait absolument légitime de se poser la question quelles valeurs nous défendons ? Est-ce seulement le mercantilisme ? Certes non, mais en ayant les mains liées nous sommes obligés d’être le plus diplomatique possible. Cela débouche sur des compromis boiteux qui ne peuvent que déclencher au sein de notre société, une opposition de plus en plus forte de caractère raciste. En agissant de la sorte, ces autocrates font le jeu des populistes. Mais comme c’est à craindre, lorsqu’on observe ce qui se passe avec Vladimir Poutine, nos forts en gueule seraient plus enclin à approuver leurs méthodes. C’est un effet pervers qu’il ne faut pas ignorer. Il est à craindre que ce soient les premiers maillons de l’internationale populiste.

pm

http://www.lemonde.fr/international/article/2016/08/07/turquie-erdogan-appelle-a-une-manifestation-monstre-a-istanbul-contre-le-coup-d-etat-manque_4979422_3210.html

Pierre Mathias

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