Ne nous faisons pas d’illusions, la liberté et la sécurité font mauvais ménage. La sûreté a son prix et restreint fatalement le libre exercice des activités individuelles. Je dirais même plus, elle peut restreindre ce qu’on désigne comme la qualité essentielle de la démocratie. Lorsqu’elle est prise comme prétexte pour protéger soi-disant les populations, elle peut être un élément important pour une prise de pouvoir totalitaire. La peur est un élément de base pour ce genre de tribulations. On attend « du grand sauveur » qu’il se conduise comme un père sévère et qu’il combatte tous les éléments perturbateurs. À première vue cela pourrait paraître tentant, mais ce ne l’est pas. Pourquoi ? Parce ce que c’est lui seul qui définit ses ennemis et qui les punit. Souvent ses opposants, ce qui pour une démocratie est une antithèse. Ce phénomène est perceptible en Turquie par exemple, où le Président Erdogan a pris pour prétexte le conflit kurde pour désavouer l’opposition et mettre en quarantaine la liberté d’expression. Les journalistes en savent quelque chose et ne peuvent plus exercer leur métier d’une manière libre.

En France l’état d’urgence restreint la libre circulation physique est des idées. Elle interdit les manifestations politiques et permet aux forces de l’ordre d’opérer sans contraintes juridiques dans bien des cas. Des personnes sont gardées à vue, sans avoir commis des méfaits. Ce sont des mesures préventives, que les affreux attentats ont rendues nécessaires. Il y a forcément des abus, mais ils sont relativement limités. François Hollande a fait appel aux citoyens d’approuver ces mesures afin d’éviter que la catastrophe du 13 novembre 2015 se reproduise. Il a bien indiqué, qu’en aucune façon il ne serait compatible de remettre en questions les libertés publiques. Je le crois ! Mais qu’en serait-il si le chef de l’État se croyait obligé de se refaire une popularité en proclamant des mesures draconiennes ? Et ceci sans pour autant être certain, qu’elles n’entravent pas nos valeurs. Philippe Pétain, pour prendre un autre exemple, a institué une dictature pour soi-disant sauver la France. Pour instaurer son pouvoir, il a banni tous les gardes-fous parlementaires et a transformé la chambre des députés en un grand-guignol. Sans d’autres raisons que celles de plaire à l’envahisseur nazi, il a poursuivi les Juifs et tous ceux qui le gênaient. Dans un tel cas il n’était nullement question de sécurité, malgré ce que prétendaient les dirigeants. Je dirais sans hésité que les mesures de sûretés ont été mises en place au nom du crime organisé. C’est la raison pour laquelle j’exige qu’elles soient limitées dans le temps et dans l’action. Chacun qui se sent discriminé, doit pouvoir faire appel et être jugé comme l’exige la loi. Pouvons-nous remettre en question l’héritage du siècle des lumières ? En aucun cas ! Les stratèges de l’EI veulent obtenir de nous, que nous renions tout ce qui fait notre force mentale, un esprit indépendant. Ils savent que les populistes se dirigent dans la même direction, en pratiquant l’exclusion. Non, nous ne pouvons pas l’admettre, même si l’angoisse nous tenaille. Plutôt être en danger que de renoncer à nos libertés fondamentales. Non, personne ne pourra me museler, quoiqu’il arrive.

pm

http://www.lemonde.fr/attaques-a-paris/article/2015/11/26/securite-ou-libertes-publiques-le-debat-piege_4818143_4809495.html

Pierre Mathias

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