Que l’islamisme radical soit pour certains désespérés un attrait, m’a semblé à première vue erroné, mais plus j’y réfléchis, plus cette thèse me parait-être plausible. La violence implique une action. Elle ne peut pas s’accommoder de la passivité. Souvent elle concerne plusieurs personnes, qui se sont mises sous une même bannière. Elle peut être un facteur de solidarité. Des éléments essentiels pour tous ceux qui ont peur de partir à la dérive. Sans un esprit totalitaire, il n’est guère possible de réaliser des attentats ou de prendre le pouvoir dans des régions entières comme c’est le cas de l’EI. L’initiative personnelle n’y est pas de mise. Le pouvoir quasi total des chefs, est le moteur des actions meurtrières. C’est l’antithèse de ce qu’on peut nommer la liberté, où tout individu est responsable de sa destinée et celle des autres. Un court-circuit fatal qui produit de l’injustice, de l’intolérance, de la haine. Cette dernière est un atout de taille pour transformer un être labile en une machine à tuer. Plus réfléchir, se dégager des contraintes morales et éthiques, sont des éléments importants pour un grand nombre de désespérés, qui ne sont pas en mesure de prendre eux-même leur existence en main. Il vient s’y ajouter l’élément religieux, qui peut-être considéré comme alibi à un comportement impliquant de la violence, qui lui donne sa légitimité. Un effet pervers qui se transforme en une arme redoutable. Tout ce que la personne concernée fait a ainsi un aval divin, ce qui rend évidemment complètement aveugle. Dès que toutes atteintes à la dignité humaine sont pardonnées d’avance, il n’y a plus de garde-fous. Tout est permis. C’est la raison pour laquelle tous dictateurs, mêmes ceux qui sont plus ou moins athées comme Adolf Hitler, font appel à Dieu pour motiver les troupes à agir brutalement.

La légitimation divine de la violence est un atout de taille pour les islamistes. Ils peuvent ainsi recruter nombre d’adhérents, qui dans une situation normale, ne feraient pas de mal à une mouche. Du point de vue psychologique un tel environnement offre aux « faibles » un cadre bien défini, qui leur fait cruellement défaut. Le facteur temps joue aussi un rôle. Le résultats de la violence peuvent être enregistrés sur le champ. C’est le phénomène qu’on observe avec les attentats-suicides. Ceux qui ont eu lieu hier à Beyrouth ont entraîné dans la mort grand nombre d’innocents. Au lieu de scandaliser, ils incitent d’autres fous de Dieu à agir. Et ceci même si c’est au prix de leur vie. L’impression enfin d’être utile à quelque chose, est probablement la plus grande motivation. La peur de sombrer dans l’indifférence générale est sûrement la cause de toutes ces horreurs. Les désespérés, ceux pour qui l’existence n’est pas une fin en fin en soi, ont recours à la radicalité pour se réaliser, tout au moins ils le croient. Ce facteur est pris en compte par les manipulateurs, qui n’ont aucun mal à trouver leur clientèle. Tous ceux qui croient avoir raté leur vie, sont des candidats potentiels. Pour lutter contre ce phénomène, seule l’éducation peut jouer un rôle à condition que les parents ne soient pas touchés par la même tare. Accepter sa situation implique beaucoup de caractère. Une denrée rare qui peut aussi impliquer de la violence.

pm

http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/11/12/pour-les-desesperes-l-islamisme-radical-est-un-produit-excitant_4808430_3224.html

Pierre Mathias

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