Monsieur le Président,

Comment ne pas vous donner raison en ce qui concerne l’injustice que représente la directive de l’UE du travail détaché ? D’une part il y a les personnes concernées qui sont dans l’obligation de travailler dans des conditions sociales dignes du temps du capitalisme dur et pur de Manchester ; de l’autre la concurrence déloyale envers les entreprises locales ne pouvant pas tenir tête au dumping des offres proposées venant de nations plus pauvres. Le salaire-horaire et la couverture sociale sont ceux des pays, où est sise la société qui envoie ces travailleurs chez nous. Ce sont tout d’abord des membres de l’Est européen comme la Slovaquie, la Roumanie la Bulgarie et j’en passe. Des endroits connus pour leur niveau de vie modeste. Cette pratique est insupportable et doit être éradiquée au plus vite.

Tout cela ne serait pas arrivé si l’UE s’était dotée d’un programme qui aurait pour but d’harmoniser à la longue le niveau des salaires, leur imposition et tout particulièrement le niveau et la forme des prestations sociales. Sans une telle initiative l’UE s’écroulera. Depuis des années je lutte comme citoyen pour une Europe sociale, mais je dois malheureusement constater que Bruxelles fait la sourde oreille, car cela ne correspond en aucune manière aux intérêts des lobbys. Il est bon, comme vous l’exigez, que dans un premier temps chaque salariés soit payé au niveau des conditions des pays où il est envoyé en mission. Cela inclut aussi les cotisations sociales. Dans un tel contexte il serait impossible de faire des offres de soumissions « dumping ». L’équité serait garantie, tout au moins sur le papier. Mais tout cela n’est qu’un premier pas pour éviter d’autre dérives. Où veux-je en arriver ? Je souhaiterais, Monsieur le Président, que vous exigiez des partenaires européens qu’ils mettent enfin le chantier d’une Europe citoyenne en route. Vous savez comme moi qu’il ne faut pas s’attendre à une prise de conscience identitaire tant que l’UE ne tient pas compte des besoins personnels de chacun. Tant qu’il n’y aura pas d’initiatives allant dans cette direction, il aura rejet. C’est regrettable mais c’est la réalité.

Ne nous faisons pas d’illusions, la liberté de circulation au sein de l’UE des biens et des personnes ne pourra que fonctionner efficacement en appliquant les revendications énoncées. Comme vous l’avez évoqué à maintes reprises, l’avenir de l’Europe ne nous tient pas seulement à cœur pour des raisons géopolitiques, mais est la condition absolue de notre essor économique et social. Sans elle l’avenir serait plutôt sombre. On ne peut exiger de personne de l’aimer, mais il faut absolument éviter que bon nombre de personnes déteste l’UE à cause des injustices qu’elle génère. Votre démarche concernant le travail détaché pourrait peut-être mettre en branle tout un processus rénovateur. Je suis d’avis que la France devrait risquer un éclat pour faire avancer les choses. Ce serait en premier lieu d’interdire de telles pratiques sur le territoire national. Je pense que ce serait un immense service rendu à la construction européenne, un changement drastique des mesures appliquées jusqu’à ce jour. Une telle crise, s’il y en a une une, donnerait lieu à de nouvelles négociations. Je trouverais souhaitable que le couple franco-allemand fasse au plus vite des propositions pour relancer l’Europe.

Je suis tout à fait conscient du travail que cela représente, mais je pense que vous êtes à la hauteur du défit. Le but escompté est de remettre l’UE sur les rails. Mais pour y arriver il faudra soutenir efficacement les pays connaissant le marasme économique. Je suis partisan de considérer chaque pays de l’Union comme faisant partie intégrante de notre société. Cela implique une égalité des chances qui ne peut que passer par plus de solidarité. La raison pour laquelle je trouve légitime que chacun d’entre nous s’implique plus pour aider nos frères et sœurs européens qui ont du mal à assumer leur quotidien. Le déséquilibre actuel peut nous mener à notre perte. Qu’on se le dise.

Bon vent Monsieur le Président ! Je souhaite que vous vous fassiez entendre.

Pierre Berger

pm

http://www.lemonde.fr/europe/article/2017/08/23/travail-detache-macron-obtient-un-geste-de-l-europe-centrale_5175773_3214.html

Pierre Mathias

Manuel Valls veut lutter contre la droite réactionnaire, ce qui est son droit le plus absolu. Mais avec quel parti socialiste ? Pour pouvoir réussir un pari qui semble aujourd’hui presque impossible à réaliser, celui de se maintenir au pouvoir, la gauche doit se redéfinir. Est-elle compatible aux idées d’un Tony Blair ou d’un Gerhard Schröder ? Peut-elle survivre à l’heure actuelle en faisant constamment des compromis ? Ou doit-elle être pure et dure ? Une question que se pose les Anglais. Jeremy Corbyn, le candidat d’extrême-gauche du Labour, est en tête des sondages en ce qui concerne l’élection de la nouvelle direction. Il veut nationaliser des pans entiers de l’économie, rouvrir des mines de charbon, augmenter les impôts pour les riches. Une idéologie qui remonte au temps de la lutte contre la dame de fer, Margaret Thatcher. Mais il suit aussi une voie franchement anti-européenne en se ralliant aux diatribes des populistes. Un replis sur soi-même en parfaite opposition à l’Internationale. On en est pas à une contradiction près. Un retour en arrière qui ne présage rien de bon. Il en est de même aux USA dans les primaires démocrates, où Bernie Sanders préconise aux électeurs de son parti d’opter pour un modèle socialiste de la société. En France le gouvernement est attaqué par les frondeurs, qui suivraient probablement le point de vue d’un Alexis Tsipras. Weiterlesen