Après vingt ans de pouvoir, il serait légitime de penser à une retraite bien méritée. Mais en politique cela ne marche pas ainsi. Vladimir Poutine, sans raisons évidentes, essaie de briser l’opposition en retirant aux candidats indépendants le droit de se présenter aux élections municipales. Une mesure mesquine qui témoigne d’une grande insécurité. Il y a eu, comme vous le savez, des manifestations. Il y a une semaine plus de 1400 personnes ont été arrêtées, pendant ce week-end environ 800. S’il s’avère qu’elles ont été déjà condamnées pour atteinte à l’ordre publique, elles encourent quinze ans de prison. Je ne comprends pas qu’un homme intelligent comme lui ait recours à la répression, d’autant plus qu’une majorité de ses compatriotes lui sont favorables. Psychologiquement cela voudrait probablement dire que sans le pouvoir de telles personnes perdent pied. Qu’elles en sont tellement imprégnées, qu’un retour à une vie civile représente pour elles le déclin, en fin de compte la spectre de la mort. Il doit y avoir une crainte viscérale, que tout puisse partir à la dérive, qu’il y ait perte de foncements. Cela n’a plus rien à voir avec la logique. C*est le mental qui domine de telles actions. Vladimir Poutine, s’il se remettait en question, saurait parfaitement qu’il nuit ainsi à sa réputation. C’est la preuve qu’un intellectuel, il l’est, n’est pas à l’abri de son instinct de conservation. Cela n’a rien à voir avec le pragmatisme, mais est plutôt l’expression d’une angoisse. Peut-être craint-il qu’il puisse y avoir des réactions comme celles de Hong Kong, où le peuple brave la toute puissante Chine, afin de sauvegarder la démocratie.
L’Allemagne et la France condamnent officiellement ce qui s’est passé à Moscou. Paris « rappelle son attachement à la liberté d’expression dans toutes ses composantes, y compris celle de manifester pacifiquement et de participer à des élections libres et transparentes. » Si Poutine avait été en proie aux Gilets Jaunes, je pense que le sang aurait coulé. La France « appelle la Russie à libérer sans délai les personnes incarcérées ces derniers jours et à se conformer aux engagements auxquels elle a souscrit en tant que membre de l’OSCE et du Conseil de l’Europe .Ces sujets font partie intégrante de notre dialogue politique exigeant avec la Russie ». Il est évident qu’une attitude aussi belliqueuse envers des manifestants pacifiques est nocive en ce qui concerne les relations entre l’UE et la Russie. Berlin a aussi réagi en publiant un communiqué . Le gouvernement condamne « les ingérences répétées dans le droit garanti aux rassemblements pacifiques et à la liberté d’expression qui violent les obligations internationales de la Russie et remettent fortement en question le droit à des élections libres et équitables ». Ce qui se passe actuellement est en opposition complète au bon-sens. Il serait de l’intérêt de Vladimir Poutine d’améliorer les relations avec l’Europe, afin de redresser la situation économique, où se trouve son pays. Mais un homme acculé psychologiquement comme lui par les contraintes du pouvoir, ne peut pas agir d’une manière pragmatique. Il se sent blessé au plus profond de lui-même lorsqu’il y a résistance. Pourtant il n’a rien à craindre, mais ce sont des réflexes qu’il ne domine pas. Il est devenu l’esclave de lui-même.
pm