Le journaliste allemand, Deniz Yücel, qui possède aussi un passeport turc, a quitté hier la prison de Silivri située à 70 kilomètres d’Istanbul. Il a regagné le soir même l’Allemagne dans un avion privé mis à sa disposition. Le journaliste de 44 ans du quotidien « Die Welt » est ainsi remis en liberté conditionnelle. Il encourt une peine de prison entre 4 et 18 ans. Il est accusé de « propagande pour le compte d’une organisation terroriste » et « incitation à la haine ». Yücel avait été arrêté le 14 février 2017 à la suite de rafles opérées contre des membres de la presse. C’est sur l’intervention de Sigmar Gabriel, le ministre des affaires étrangères et de la Chancelière, qui avait reçu le premier ministre turc Binali Yildirim il y a deux jours à Berlin, que cette libération a été négociée. Yücel a eu beaucoup de chance. Ses compagnons d’infortune Ahmet Altan, ancien rédacteur en chef du quotidien Taraf, et les journalistes Mehmet Altan, Nazli Ilicak, Fevzi Yazici, Sukru Tugrul Ozsengül et Iakup Simsek, incarcérés depuis 2016, ont été condamnés à prison à vie pour avoir soi-disant participé au putsch manqué du 15 juillet 2016 contre Recep Tayyip Erdoğan. Un signe que la Turquie passe en ce moment le cap de la dictature. Comme un de mes amis l’a fait remarqué sur Facebook, la libération de Deniz Yücel ne doit pas faire oublier que de très nombreux journalistes sont encore emprisonnés et le resteront probablement pour longtemps dans les pénitenciers du régime.

Des bruits courent que la libération du reporteur de « Die Welt» aurait été monnayée par l’acceptation de réarmer les chars d’assauts Leopard 2 que la République Fédérale avait vendus à la Turquie dans le cadre des accords conclus dans le cadre de l’OTAN, où les membres se doivent assistance mutuelle en cas d’attaque. Le gouvernement turc considère le PKK, le parti ouvrier kurde, comme un ennemi et n’a aucun complexe d’envoyer ses tanks allemands en Syrie, pour combattre les troupes kurdes, soutenues par l’Allemagne et les USA. Berlin dément énergiquement d’avoir participé à un tel marché, mais l’arrière-goût reste. Angela Merkel a déclaré que que la vente de nouvelles armes ne pourrait être autorisée ou non que par le nouveau gouvernement, qui n’est à l’heure pas encore formé. La libération de Deniz Yücel n’est qu’une goutte d’eau dans le contexte des rapports détériorés entre les deux pays. L’Allemagne a beaucoup de mal à accepter les coups de boutoirs contre la démocratie comme ils sont pratiqués à l’heure actuelle par Ankara. Les rapports diplomatiques sont franchement détériorés d’autant plus que le président et les membres de son gouvernement n’ont eu aucun complexe de mener des compagnes électorales sur le territoire allemand. Erdoğan a même accusé les membres du gouvernement d’être des nazis, ce qui a été évidemment été considéré comme un affront. S’il n’y avait pas un grand nombre de citoyens turcs habitant sur le territoire allemand, je pense que cela aurait pu mener à une rupture des relations diplomatiques. Mais pour ne pas déclencher des troubles en République Fédérale, il faut louvoyer. Il faudra voir, dès que l’Allemagne sera doté d’un gouvernement, ce qui se passera. Probablement qu’une petite accalmie.

pm

http://www.lemonde.fr/europe/article/2018/02/1a6/turquie-un-journaliste-libere-six-autres-condamnes-a-la-perpetuite_5258268_3214.html

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