Je suis le dernier à vouloir faire de la morale, sachant qu’un homme est très fragile lorsqu’il s’agit de tentation. Mais il y a aussi des limites qui mettent à l’épreuve mes bons sentiments s’il s’avérait exact ce que la justice est en train de rechercher et ce que le Canard Enchaîné révèle dans son édition de mercredi. Des perquisitions ont été effectuées à l’Assemblée nationale. Des factures signées par Penelope Fillon ont été trouvées. Jusque là rien de bien spécial. Mais pour les enquêteurs le doute plane qu’elles auraient pu être écrites après coup afin de donner un caractère plus légal en ce qui concerne le soi-disant travail fictif. Ce serait faire usage de faux. C’est une des raisons pour laquelle l’épouse du candidat du LR sera mise en examen elle aussi. Quant au doute du Canard Enchaîné il s’agit d’un deal qui aurait été passé entre la société-conseille de l’ancien premier-ministre et un homme d’affaires libanais, Fouad Makhzoumi, un négociant en pipelines, dont le but était de lui faire rencontrer Vladimir Poutine et son entourage en 2015. Pour ce gracieux service, François Fillon aurait encaissé 50.000 dollars. Comme on le voit cette journée est pleine de rebondissement. Le tableau ne serait pas complet s’il n’y avait pas l’affaire d’un bon père de famille. Je veux parler de l’ancien ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, qui a dû jeter l’éponge parce qu’il employait comme parlementaire un personnel extrêmement qualifié. Je veux parler de ses filles, tout d’abord lycéennes, ensuite étudiantes. Il est regrettable qu’il ne soit pas lui aussi candidat à le présidence.
On pourrait en sourire mais je ne fais pas. C’est la démonstration qu’il n’y charité que pour les mieux nantis. La vie politique française a du plomb dans l’aile, d’autant plus que la grande moralisatrice qu’est Marine Le Pen, ne plane elle non plus dans la félicité. Mais elle sait au moins comment on peut déjouer la justice : en ne se rendant pas aux convocations. Et c’est justement les deux prévenus qui parlent d’excellence. Je ne sais pas trop quel effet font leurs magouilles sur les jeunes des cités, qu’il faut traiter avec une main de fer. C’est de la plaisanterie, Monsieur Fillon ! S’il y avait de la tolérance zéro, comme le préconise Emmanuel Macron, il serait prévisible que vous aillez des ennuis bien plus graves que ceux qui vous rendent la vie difficile. À la rigueur je comprends que vous ne jetiez pas l’éponge, mais par pitié ne jouez pas à un homme au-dessus de tous soupçons. Ce n’est pas crédible et souligne bien les disparités au sein de notre société : deux poids et deux mesures. Je pense que pour combattre la délinquance le monde politique, de la commune à la tête de l’État, se doit de montrer l’exemple. Je suis le premier à déplorer la violence dans certaines cités. Mais une chose est clair, Madame Le Pen, Monsieur Fillon et Monsieur le Roux, votre conduite ne les encourage pas. Elle les incite plutôt à commettre des délits, parce qu’ils voient des notables se remplir les poches. Leur frustration, qui pousse certains d’entre-eux dans le fondamentalisme, n’a-t-elle pas son origine dans le fait que des privilégiés s’enrichissent au dépend de la collectivité sans être trop inquiétés. Avant de propager de bons conseils, vous feriez bien de vous regarder dans le miroir.
pm