Michel Field, directeur de l’information de France 2, est accusé d’être un peu trop complaisant envers l’Élysée. « Dialogue citoyen », l’émission avec François Hollande prévue pour le 14 avril, aurait subi, d’après ses détracteurs, des pressions du château concernant le casting des invités. La chaîne apporte un démenti. Il est probable qu’on ne saura jamais la vérité. Cet incident me permet de remettre sur l’établi la question de l’indépendance de la presse. Elle n’est pas évidente lorsqu’il s’agit d’enquêter. Il n’est pas interdit pour un journaliste de montrer de la sympathie pour telle ou telle tendance, d’apporter son soutien aux politiciens qu’il considère comme étant capable de mener les affaires. Cela revient à dire que l’objectivité individuelle ne peut pas exister. C’est ce que j’ai toujours dis à mes réacteurs en chef. Je me suis toujours présenté comme un être subjectif, qui ne pouvait que représenter ses opinions. J’étais donc totalement opposé à un dédoublement de la personnalité. Pour rétablir l’équilibre, je trouvais opportun qu’un collègue ne partageant pas mes vues, reprenne le même sujet. Au public alors de se faire une opinion. Cette méthode est parfaitement efficace pour enrayer toutes tentatives de bourrage de crâne. C’est un hommage aux lecteurs ou téléspectateurs qui ont plus de jugement que l’on veut bien admettre. Non, nous n’avons pas à faire à des ineptes, loin de là. Le débat du mercredi parlera de lui-même. Lorsque les propos sont truqués, la combine apparaît. Il est très difficile de tricher. Le direct réclame de l’authenticité, de la fraîcheur. Toutes manipulations se dévoilent d’elles-mêmes. Si le dialogue n’est pas contradictoire, il ne vaut rien ! Je pense que le Président de la République est trop intelligent pour l’ignorer. Passons !

Ce qui à mes yeux est bien plus grave, c’est l’intervention musclée de Recep Erdoğan afin de clouer le bec d’un humoriste allemand, qui a osé, o lèse-majesté, de l’attaquer verbalement à la télévision. Le grand chef exige du gouvernement de Madame Merkel, qu’il accepte une procédure pénale contre cet animateur. Une manière de démontrer à l’Europe, qu’il l’a pris en otage. Le prix à payer pour le compromis obtenu concernant les réfugiés, prend toute sa dimension dans un tel contexte. C’est de la censure transfrontalière que nous vivons là. C’est parfaitement inacceptable. Dans le cas qui concerne France 2 et Monsieur Field on est loin de là. Mais je trouve tout à fait légitime que des questions soient posées. Il faut que la presse soit soumise à un contrôle citoyen, exigeant d’elle la plus grande liberté. Tout ce qui pourrait l’entraver est une attaque contre la démocratie. L’exemple de la Turquie, de la Hongrie ou de la Pologne nous montre bien ce que peut provoquer la censure. C’est mettre en veilleuse le peuple au profit de l’autocratie, de l’eau sur le moulin des apprentis-fascistes. Il est démontré que partout où le populisme est gagnant, la liberté d’expression est mise en sourdine. Et ceux qui ne s’y conforment pas, sont mis en prison. C’est si simple que cela. C’est la raison pour laquelle il faut faire opposition à toutes tentatives d’intimidation. Je trouve déplorable qu’on interdise le plateau à des personnes qui doutent, qui critiquent.

pm

http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2016/04/11/france-tv-les-methodes-de-michel-field-contestees_4899980_3236.html

Pierre Mathias

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