Le clivage gauche-droite ne joue plus à l’heure actuelle en France. Le gouvernement de Manuel Valls fait une politique plutôt de droite. Elle est dictée par les événements. La déchéance de la nationalité en est une preuve fracassante. Il n’est pas étonnant que dans ce contexte, qu’un homme intelligent et pondéré comme Alain Juppé gagne des appuis sur tout l’échiquier politique. Il se dit de droite et l’est sûrement. Mais c’est un homme de dialogue, qui a comme priorité la cohésion nationale. Dans la situation actuelle il serait désavantageux de polariser les présidentielles sur des questions idéologiques. Marine Le Pen s’en charge et c’est assez ! Lorsqu’il y a feu à la maison, il faut avant tout l’éteindre avant d’envisager quoi que ce soit. C’est exactement dans cette situation où nous nous trouvons. Je pense que l’ancien premier ministre remplirait les conditions nécessaires. Nicolas Sarkozy au contraire, remettrait le feu aux poudres, ce qui serait fatal pour la France. Et François Hollande ? Il me déconcerte. Son profil de chef de guerre ne lui sied pas, bien que sa cote remonte. C’est certes un homme de compromis avec de grandes qualités. Mais il est plus à même d’agir depuis les coulisses. Il n’a pas réussi à réformer la France, comme il le souhaitait, parce qu’il hésitait à faire mal. À force de vouloir plaire à tout le monde, on se désavoue une fois ou l’autre. Il a des qualités et je trouve les attaques contre lui souvent injustes. Le présenter comme bouc-émissaire nuit au pays. Mais que faire s’il se représente. Je pense personnellement qu’il serait mieux qu’il se retire, car il n’a que peu de chances. Ce serait mettre la gauche dans une situation des plus précaires.

Manuel Valls a l’ambition de prendre sa place, mais je crains qu’il soit parfois trop tranchant pour rassembler une majorité. Les militants de l’aile gauche du PS ont du mal à l’admettre. À part eux je ne vois personne au portillon. Dans un tel cas il faut voter utile et le seul à mes yeux qui puisse remplir les conditions nécessaires est Alain Juppé. Il n’est pas de mon bord, mais pour l’instant je ne vois pas d’alternatives. Mais on en est encore loin. Les joutes qui se préparent chez les Républicains seront coriaces. Il y a ceux qui du côté de l’ex-président qui lorgnent du côté du FN, même s’ils prétendent le contraire. Et il y a les modérés qui soutiendraient le maire de Bordeaux. Il est à craindre qu’ils n’aient pas le punch de gagner la mise. Une scission de la droite modérée serait un cas de figure qu’il s’agirait absolument d’éviter. Dans un tel cas la seule alternative serait de trouver un terrain d’entente au centre, incluant certaines tendances du PS. Nous nous dirigeons vers une nouvelle distribution des cartes, où les responsables joueraient un rôle plus important, que leur famille politique. Ce fait n’est pas idéal, car une personnalisation excessive de la politique peut être un frein à la démocratie, ce que je ne souhaite pas. Mais dans un tel contexte il serait temps que les partis, que ce soit à gauche comme à droite, élaborent des programmes convaincants, au lieu de se tirer dans les pattes. Ne nous leurrons pas, tant que cela ne se passera pas, il vaut mieux élire Alain Juppé que de se battre mutuellement. L’image des dirigeants s’est à un tel point détériorée au yeux des Français, que seul des solutions hors normes peuvent avoir du succès.

pm

http://www.liberation.fr/france/2016/01/04/juppe-de-gauche-certainement-pas_1424299

Pierre Mathias

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