Que ce soit à Chicago, où des policiers ont à nouveau fait parler d’eux en tuant un noir, ou à Ajaccio où des manifestants réclament le renvoi de tous les arabes, nous sommes très loin de la tolérance, qui elle seule peut garantir une vie commune. Il est fatal que des réflexes tels que l’Europe a toujours connus, incitent de « braves citoyens » à perdre toute mesure. On ne peut obliger personne d’aimer qui que ce soit, mais de là à pratiquer la ratonnade il y a un pas qu’il ne s’agit pas de faire et ceci dans son propre intérêt. Je ne vais par revenir sur les causes qui ont causé la colère populaire en Corse. C’est l’étincelle qui a mis le feu aux poudres et qui reproduit assez bien l’ambiance qui règne actuellement en France. Celle de l’exclusion. Comment arriver dans de telles conditions à une intégration qui fait cruellement défaut, si même à la tête de l’État on se laisse entraîner par un courant plus ou moins musclé ? Il y a de quoi réfléchir. Je veux parler de la déchéance de la nationalité, qui s’adresse avant tout à un cercle de personnes issues de l’étranger. Ce n’est pas un individu originaire du Limousin qui se verra retirer son passeport en cas de délit, mais bien des « basanés ». C’est ce qui donne un relent désagréable à une mesure répressive. Elle ne se base pas uniquement sur des faits objectifs, même si le projet de loi dit autre chose. Elle concerne une tranche de la population bien précise et peut être considérée comme sélective. N’est-on pas en principe tous égaux ? Non ! Il serait alors temps d’arrêter toutes ces chimères, qui dans les faits ne riment à rien.
Que ce soit aux USA ou sur notre continent, la haine raciste gagne du terrain, car les gens ont peur. Les blancs en Amérique qui bientôt appartiendront à une minorité, de même en Europe où le flux des populations venant d’ailleurs pourrait, d’après les populistes, créer un déséquilibre. Des faits non réfutables mais que personne ne peut freiner. La peur provoque dans tous les cas la violence. Qu’il soit dit, il serait temps de revenir à plus de modération. Il serait indispensable que les gens réfléchissent à des solutions équitables pour tous, sans pour autant démoniser les uns par rapport aux autres. Je parle aussi bien des victimes que des agresseurs. Il y a des faits irréfutables qui ne peuvent pas être réglés en pratiquant une sélection. Il s’agit de faire très attention de ne pas provoquer des émeutes qui pourraient vite se transformer en une espèce de guerre civile. Les nerfs sont à blanc, qu’on se le dise. Il suffit d’un incident, qui en temps normaux seraient plutôt du ressort des faits divers, pour que la machine toute entière s’enraille. C’est la raison pour laquelle il serait éminemment urgent, que les responsables politiques de tous bords s’asseyent autour d’une table pour esquisser des solutions d’avenir. Par la force des choses, elles doivent être logiques, inclure toutes les sensibilités. Si nous voulons défendre les valeurs de la République, nous ne pouvons exclure personne. Ce serait nous renier d’agir autrement. J’adresse aussi des reproches à tous les individus qui se sont mis en tête de régler leurs problèmes par la force. Peu importe leurs origines. Je les somme d’arrêter de verser de l’huile dans le feu. Probablement un vœux-pieu !
pm
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