Maintenant il est possible de voir à peu près une fois par semaine, Jane Fonda, les poignets ficelés, en photo. Cette star de 81 ans a été arrêtée par la police pour la quatrième fois à Washington, pour avoir manifesté illégalement pour la sauvegarde du climat. Je salue son engagement, qui a été provoqué par le mouvement de Greta Thunberg. Il est bon que des personnalités du show-business, du sport, de la culture en général prennent positions contre l’obscurantisme d’un Donald Trump par exemple. Lorsqu’il faut sensibiliser les masses, tous les moyens médiatiques sont bons. Cela concerne tous les domaines de la politique. Je voudrais citer dans ce contexte Marlène Dietrich, qui malgré une carrière assurée par les nazis, a tourné le dos à son pays pour dénoncer ailleurs le régime d’Adolf Hitler, d’inciter les gens à se détourner des horreurs commises contre l’humanité. Cette grande dame est restée fidèle à elle-même jusqu’à sa mort à Paris en 1992. De même que le grand chef d’orchestre Arturo Toscanini. Leur attitude est restée ancrée en moi jusqu’à ce jour. Quelle différence avec Wilhelm Furtwängler qui a collaboré avec le régime par opportunisme. On ne peut pas exiger du peuple de se mettre de travers, si ceux qui créent l’opinion faillissent à ce point. Jane Fonda n’a plus besoin de pub. Elle réagit parce que sa conscience le lui commande. Permettez-moi de revenir sur tous ceux qui dans le monde du spectacle ont collaboré sous l’Occupation. Je ne vais pas jeter l’anathème sur tous, car je sais que dans certains cas la peur les a régi. Mais lorsqu’il s’agit d’opportunisme, je ne suis pas tolérant. Certains acteurs voulaient jouer. Il en allait de leur existence matérielle. Je me demande comment sous de telles conditions, des chefs-d’œuvre ont pu voir le jour, comme les Visiteurs du soir de Marcel Carné, sorti sur les écrans en 1942. Je ne sais pas comment être en mesure de jouer dans de telles conditions. Weiterlesen

Céline provoque chez moi des sentiments contradictoires. D’un côté l’écrivain génial, que je considère comme étant l’un des plus importants de la littérature française du 20ème siècle, de l’autre le délateur qui n’a pas hésité de faire envoyer ainsi des gens aux camps de la mort. Charles de Gaulle, qui aurait dû approuver sa peine de mort, l’a sauvé de la guillotine. Contrairement à d’autres collaborateurs qui furent exécutés, Céline fut gracié, bien qu’il ait été un des plus abjectes criminels. Toute la question qui se pose pour moi, est de savoir si on peut dissocier une œuvre d’un comportement humain. Dans ce contexte particulier il y a deux démarches différentes. Il y a des livres comme « Le voyage au bout de la nuit », où l’aspect comportemental de l’écrivain n’est pas aussi marqué que les pamphlets immondes contre les juifs qui ont été écrits pendant l’occupation. Ici l’homme émerge avec une grande clarté. Il n’y a là pas de dualité comme c’est le cas dans son récit « D’un château l’autre » où il décrit d’une manière magistrale l’exode du gouvernement de Vichy à Sigmaringen en Allemagne du Sud à la fin de la guerre. Les traîtres à la patrie regroupés autour de Philippe Pétain mènent pendant quelques mois l’existence d’un régime en exil. Ce portrait dévastateur reproduit d’une manière impressionnante le déclin, le déni et la décadence de certaines personnes qui se prenaient pour des penseurs. Une perversion de l’âme, déchirée entre la volonté de briller et une autre réalité qui est celle de larbins qui se sont prêtés à la violence pour satisfaire leur avidité de pouvoir en se mettant à la solde de l’ennemi. Céline y est sans pitié. Nous nous trouvons dans une opérette macabre qui reflète d’une manière acide ce que l’homme peut devenir, s’il vend son âme. Force est de penser au Faust de Goethe qui l’a fait dans l’espoir de se réaliser. Weiterlesen