Ce qui se passe dans l’empire carcéral est une réplique de ce qui se déroule dans la vie de tous les jours, mais dans un espace réduit. Un bouillon de culture avec tous ses aspects négatifs. Mais dans un tel environnement, il n’y a pas d’échappatoires. Tous les réflexes sont multipliés par mille, ce qui amène forcément des réactions violentes. Un pénitencier engendre de la haine. Je suis persuadé qu’il en serait de même si j’étais dans une telle situation. Contrairement aux camps de concentrations, la majorité des détenus ne sont pas forcément psychologiquement détruits, car dans la plupart des cas il y a une autre issue que la mort. Une société dans la société se forme et a ses propres lois. Celles d’un régime autoritaire, où les faibles doivent se soumettre aux quatre volontés des boss. C’est souvent aussi le cas des gardiens, qui voient dans de tels actes de soumission le seul moyen de se faire respecter. Les liens entre eux et ceux qu’ils doivent surveiller, sont souvent pour ceux qui comme moi observe de l’extérieur de tels comportements, difficiles à comprendre. Mais si on se penche un peu plus sérieusement sur ce je nommerais la cage aux bipèdes, on est obligé d’admettre que ce milieu étouffant est régi par la violence. Les gardiens eux aussi sont en quelque sorte mis sous tutelle. S’ils ne se conformaient aux règles édictées par les détenus, ils se retrouveraient dans un terrain perdu, avec tous les dangers que cela représente. Lorsqu’il y a surpopulation, comme c’est le cas en France, la moindre tension peut mettre le feu à la maison. S’il y a un accord tacite avec les boss, en principe la violence peut être contenue. Mais il y a aussi des détenus qui ne se soumettent pas aux règles virtuelles que j’ai évoquées. Ce sont les djihadistes qui ne se considèrent pas comme étant criminels, car leurs actions sont guidées par la volonté d’Allah. Ils se démarquent ainsi des détenus de droit commun. Il n’est pas étonnant qu’ils ne peuvent que survivre, dans un milieu, qui à priori leur est hostile, en exerçant de la violence. L’agression à l’arme blanche de trois gardiens par un détenu djihadiste ne m’étonne pas en suivant ce raisonnement.
Ce qui s’est passé à la prison de Vendin-le-Vieil dans le Pas-de-Calais le 11 janvier entre dans cette logique. Ils veulent se démarquer et le font sentir de cette manière aux gardiens, qui n’ont probablement pas beaucoup de sympathie pour ces fous de Dieu, qu’ils ont leurs propres règles. Dans ces cas-là il n’y a pas de liens occultes avec eux, comme c’est la cas avec ceux qui détiennent le pouvoir dans la société parallèle qu’est le milieu de la criminalité organisée. Les surveillants se trouvent bien plus près des maffieux que des islamistes. Là aussi ils sont soumis au comportement qui leur est imposé par ceux qui ont le pouvoir au sein des prisons. Je peux très bien m’imaginer les tensions qui règnent entre les prisonniers de droit commun et ceux qui se croient être mandatés par le prophète pour imposer l’islam. Il y a sûrement aussi un grand nombre de rixes, mais on en parle pas trop, car on considère un tel comportement comme étant normal entre les détenus. Que faire dans une telle situation ? Parquer les djihadistes dans des réserves prévues à cet effet, serait se soumettre à leurs lois. L’endoctrinement de personnes plutôt modérées aurait des effets encore plus désastreux que c’est le cas aujourd’hui. Les mêler à d’autres détenus n’est pas non plus une solution. Que faire ? Il n’y a pas de réponses claires à ce sujet.
pm