Normalement je devrais me réjouir, que l’assassin du marché de Noël de Berlin ait été abattu par la police hier au cours de la journée à Milan. La justice allemande n’aura pas à le juger, ce que je trouve regrettable malgré les risques que cela peut engendrer. Il est pour moi difficile de pavoiser lorsqu’un homme, quel que soit ses méfaits, soit ainsi tué. C’était un acte de légitime-défense, d’accord, mais j’ai de la peine à l’accepter. Amri a tué douze personnes d’une manière irréductible. Il s’est rendu coupable d’un attentat odieux qui n’avait aucune justification. Il a éliminé le chauffeur polonais d’une balle lorsque ce dernier tentait de le maîtriser pour qu’il revienne à la raison. Non, il n’y a aucune circonstances atténuantes. De ce point de vue-là il ne pouvait pas en être autrement. Pourtant en ce jour de Noël je ne peux pas m’empêcher de penser à sa famille qui vit en Tunisie. Des gens qui n’approuvent en aucune manière un tel crime, une telle idéologie. Comment peut-on réagir lorsque son propre enfant commet de tels meurtres ? Il y a sûrement un grand déchirement entre l’idéal que l’on s’est fait de son fils et cette réalité terrible d’une course à l’enfer. J’ai de la peine à imaginer de quelle manière je réagirais ? Serais-je encore en mesure de faire mon deuil ? Je n’arrive pas à trouver une réponse satisfaisante.

Mais une chose est à mes yeux sûre. Ce jeune homme a été manipulé par des individus sans scrupules, qui par l’entremise d’un lavage de cerveau, ont réussi à en faire une arme humaine. Ces personnes ne seront pas, dans ce cas bien précis, jugées car elles agissent en retrait et restent anonymes. Peut-être qu’un jour un drone en Syrie ou en Irak les repérera et les tuera ? Mais ce n’est pas dit. C’est justement à ce niveau-là qu’il faut agir. Les exécutants, aussi terrible le mal qu’ils propagent, ne sont que des pions sur un échiquier. Il ne peut pas en être autrement avec Anis Amri. Ils s’imaginent avoir pu agir d’une manière autonome, ce qui à première vue peut être exact, mais en soi ils sont endoctrinés et ne peuvent pas s’émanciper. Le pire est le fait qu’ils n’en soient pas forcément conscients. La communauté salafiste, dans toute sa radicalité, est sûrement une roue de transmission. L’assassin de Berlin a été vu à proximité d’un lieu de prières, ce qui a amené les autorités à être plus strictes envers les imams qui profèrent la guerre sainte. En Allemagne il est souvent question de laxisme de la part de la police et de la justice en ce qui concerne la prévention. Amri était fiché comme étant tout particulièrement dangereux. Pourquoi l’a-t-on ainsi perdu de vue ? C’est une question qui pourrait mettre dans l’embarra les responsables de la sécurité publique. Une fois de plus une bévue qui pourrait mettre au pilori les politiques, que ce soit ceux du gouvernement central ou ceux du Land qu’avait comme devoir de le neutraliser. Il s’agit là de la Westphalie. Je ne vais pas prétendre ici que le crime aurait pu être déjoué, mais de telles pannes démontrent d’une manière éclatante la vulnérabilité de l’État. Personne, à part certains irréductibles veulent d’un État policier. Mais entre cela et le laissez-faire il y a une marge à ne pas dépasser. Peut-être n’aurions nous pas vécu ce drame !

pm

http://www.lemonde.fr/attentat-berlin/article/2016/12/23/anis-amri-le-suspect-de-l-attentat-de-berlin-abattu-par-la-police-a-milan_5053356_5051632.html

Pierre Mathias

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