Nicolas Bonnemaison, comme beaucoup d’urgentistes, s’est toujours trouvé à nouveau dans une situation, où le médecin doit apprécier ce qu’il y a lieu de faire en ce qui concerne des personnes au seuil de la mort. On l’accuse de l’avoir accéléré dans 7 cas bien précis. Il est jugé en appel à la cour d’assise de Maine-et-Loire à Angers. J’ai été confronté pas plus tard qu’au début de cette semaine, à un cas où les praticiens ont pris en fin de compte la décision d’arrêter les soins intensifs, comme la dialyse par exemple. La mort de mon ami s’en est suivie une heure plus tard. Cela s’est passé lundi à Munich. En Allemagne chaque citoyen peut remplir un formulaire dans lequel il stipule ses dernières volontés à ce sujet. Il peut s’opposer à tout acharnement thérapeutique et bien spécifier jusqu’où peuvent aller les médecins. Il l’a fait. Le corps médical doit s’y conformer, tant qu’il ne s’agit pas d’euthanasie. J’ai parlé au responsable de l’équipe en exprimant ce que mon ami m’avait toujours évoqué, soit de le laisser s’endormir en paix, de laisser la nature faire son devoir. Dans ce cas bien précis il y a eu dialogue constant entre l’hôpital et la famille. La loi régit précisément que seul un collège de médecins peut prendre une telle décision et ceci après avoir constaté que toutes thérapies ne serviraient plus à rien. Tout devient plus compliqué si à côté d’une déficience cardiaque majeure, le patient est victime d’un cancer. Si les reins ne fonctionnent plus, si tous soins deviennent obsolètes. Chez mon ami vient s’ajouter qu’il a subi une attaque cérébrale, dont les effets sont inconnus tant que la personne est dans le coma. Mais malgré toutes les modalités pour humaniser un décès, il restera toujours un fait objectif, celui de la décision finale. Celle-ci ne peut qu’être prise par le corps médical et ceci en contact directe avec les proches.

Lorsqu’on voit souffrir une personne, il est à mon avis du devoir de la famille, de soutenir tous ceux qui apportent des soins, de dialoguer avec eux. Même n’étant pas parent, le docteur a bien voulu m’écouter. Je lui ai dit que je pouvais parfaitement m’imaginer dans quel dilemme il se trouvait. D’une part le serment d’Hippocrate lui commande de tout faire pour sauver la vie, de l’autre son entendement lui dicte d’éviter toutes douleurs inutiles. Il est dans ce cas juge et exécutant. Les faits qu’on reproche au Docteur Nicolas Bonnemaison, c’est d’une part d’avoir agit seul en donnant aux grands malades un sédatif puissant entraînant un décès, de n’avoir pas mis au courant la famille. Nous avons-là un cas de mort-active. Contrairement aux Pays-Bas, où elle est acceptée en suivant un catalogue stricte de dispositions, en Allemagne comme en France cette pratique est rejetée. Dans mes reportages pour la télévision je me suis toujours opposé à la pratique néerlandaise et belge concernant l’euthanasie. Par contre je suis partisan d’un arrêt des soins, si les perspectives de rétablissement sont du domaine de l’utopie. Avec les progrès de la médecine l’échéance de la mort est repoussée de plus en plus, mais pas les effets pervers des maladies. Les soins palliatifs sont encore souvent inefficaces et ne garantissent pas un passage de vie à trépas d’une manière douce. C’est dans ce domaine qu’il faut faire des progrès pour éviter à l’avenir de tels procès.

pm

http://prdchroniques.blog.lemonde.fr/2015/10/13/proces-bonnemaison-la-loi-et-le-colloque-singulier-entre-medecin-et-agonisant/

Pierre Mathias

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