Il ne faut pas s’attendre que Madame Merkel fasse des discours enflammés pour défendre sa politique. Elle se taira le plus possible et donnera l’impression d’être au-dessus de la mêlée. C’est ce qui fait sa force. Tout aussi bien ses adversaires que ses partisans ce sont cassés les dents sur ce que des personnes non averties pourraient décrire comme de la passivité. Nous avons affaire à une femme qui connaît très bien ses limites. Elle sait qu’elle ne réussira pas à enflammer les foules avec des discours super-engagés. Elle n’en est pas capable. Je la qualifierais comme une remarquable joueuse d’échecs qui attend que son son vis-à-vis fasse une erreur tactique. Puis il y a chez elle un effet téflon. On a beau l’attaquer, elle garde son calme et donnera l’impression que les critiques ne la concernent pas. Lorsque Horst Seehofer, le chef du parti-frère, la CSU, a essayé de la déboulonner de son poste à cause de sa politique migratoire, il a échoué car toutes ses récriminations buttaient contre des parois en caoutchouc. Et tout ceci sans élever particulièrement la voix. C’est ainsi, que sur ses airs badins, elle a réussi à éliminer tous ceux qui pouvaient lui faire ombrage. En ce qui concerne la coalition avec les sociaux-démocrates elle a toujours veillé de ne pas les attaquer frontalement. Elle leur a attesté un certain succès, a fait des éloges lorsqu’elle pouvait en tirer profit. Et finalement elle est auprès des électeurs la seule bénéficiaire d’une politique portant aussi le cachet du SPD. Il faut le faire !
Son adversaire aux élections du 24 septembre, Martin Schulz, se trouve dans l’embarras. Ce qu’il dit est intelligent, censé. Mais le hic dans tout cela, c’est que la Chancelière prend aussi à son compte certains points de son programme. Elle lui enlève les vrais moyens de l’attaquer, car nous avons à faire à deux personnes modérées, ayant par bien des aspects des options communes, tout au moins c’est l’impression qui prévaut. En fait c’est un coup stratégique remarquable d’Angela Merkel ayant pour but de paralyser ses adversaires. Comment lui dire les quatre vérités, lorsqu’on a rien de vraiment palpable à lui reprocher. Pour elle il s’agit, comme scientifique, avant tout de gagner les élections et ceci sans tenter l’essai de se dévoiler. Elle sait parfaitement que les citoyens voteront pour sa personne, bien moins pour son programme. C’est bien cela qui lui donnera un grand champ de manœuvre. Ne s’étant pas engagée, elle pourra une fois élue faire prévaloir son pragmatisme. Lors de la campagne électorale, je pense qu’elle évitera d’entrer dans une confrontation directe avec Martin Schulz. Elle évoquera plutôt des généralités avec lesquels un grand nombre de personnes pourront s’y reconnaître. Elle a tout intérêt à se mettre en veilleuse, ce qui causera un grand désarroi chez ses adversaires. Pour le candidat cela doit être désespérant de taper dans du vide, de chercher un adversaire contre lequel il veut se mesurer. Il ne voit que de l’ombre. Peut-être la raison des mauvais résultats des sondages. Tout pourrait néanmoins changer si le peuple demandait d’exprimer concrètement les intentions de la Chancelière, mais je doute que cela puisse arriver, l’effet Valium faisant son effet.
pm