Qu’il soit bien clair, je souhaite la victoire d’Hillary Clinton cette nuit. Mais je ne peux pas cacher ma crainte que cela ne réussira pas forcément, ce qui serait au bas-mot une catastrophe. L’empathie joue un rôle essentiel dans des élections. La candidate des démocrates n’est pas arrivée à être aimée. On l’apprécie pour ses capacités intellectuelles, d’un point de vue objectif, elle serait en mesure de remplir les conditions qu’on réclame d’un président. Mais elle n’incarne pas une vision, ce qui avait été le cas de Barak Obama. Et c’est cela qui est un handicap essentiel, dans un pays blessé à vif dans bien des milieux. Les gens attendent d’un leader qu’il les prenne par la main pour les rassurer. Aura-t-elle les moyens de le faire ? Dans cette campagne électorale qui a été nauséabonde, bien des citoyens sont restés sur leur faim. Et que fait-on dans de telles conditions ? On se met en colère, on rue dans les brancards sans se poser la question de ce qui pourrait advenir. C’est justement cela qui rend si fort Donald Trump. Il attise et recueille l’ire populaire. Une fois de plus la preuve que le populisme ne fait pas appel à la raison. Les Américains savent parfaitement que le magnat de l’immobilier n’a sûrement pas les compétences pour gouverner le pays, mais ce n’est pas cela qui importe. Lorsque des pans entiers d’une société se disent « après moi le déluge », on peut s’attendre à tout. Et c’est cela qui rend finalement tout pronostique impossible. Est-ce la haine qui emportera la mise ? Celle des laissés pour compte, qui croient ne plus rien à avoir à perdre. Une chose est dorénavant certaine, le pays est plus déchiré que jamais. Ses bases qui semblaient solides sont fortement ébranlées. Comme les maisons qui ne se sont pas écroulées au cours d’un tremblement de terre, il n’est pas dit que dans ses fondations elles résistent à un nouveau séisme. Il en va de la survie d’une puissance à l’échelon mondial.

Peu importe qui sera le locataire de la Maison Blanche, il aura le devoir de réconcilier les ennemis de hier, les inciter à vivre honnêtement. Il sera question de sensibilité sociale et finalement d’identité. Pour l’instant je ne vois aucun des deux candidats en mesure de provoquer un tel mouvement de respect mutuel. Ne nous faisons pas d’illusions, le pays ne se remettra pas si vite d’un tel handicap. Comme l’histoire l’a démontré, le fascisme divise. Il intimide tous ceux qui ne se soumettent pas. L’exemple de la Turquie devrait faire réfléchir. Il est dorénavant possible de dire qu’aux USA comme ailleurs le pouvoir perverti. Mais toutes personnes ayant un peu de jugement se diront qu’un mariage de raison est préférable à ce qui pourrait se dessiner cette nuit. Mais comme on le sait, s’il n’y a pas d’amour, la haine prend le dessus. La raison qu’entre Clinton et le peuple la mayonnaise ne prend pas. L’homme, malgré son cerveau, retrouve toujours à nouveau son instinct originel et réagit viscéralement. C’est le ventre qui prend le dessus, quitte à provoquer un suicide. En votant pour Trump le citoyen réagit comme un dépressif chez qui toutes tentatives pour l’inciter à agir de manière sensée, échouent parce qu’il se sent mal aimé. Et c’est là que réside le plus grand danger.

pm

http://www.lemonde.fr/big-browser/article/2016/11/07/elections-americaines-si-c-etait-un-vol-commercial-on-aurait-tous-des-sacs-a-vomi_5026820_4832693.html

Pierre Mathias

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