Le parlement polonais a repoussé massivement une initiative qui prévoyait d’interdire complètement l’avortement. Jaroslaw Kaczynski, le chef du PiS, qui dans un premier temps a soutenu cette idée, en est revenu lorsqu’il a vu quelle résistance cette interdiction pouvait provoquer. Et pourtant cela correspondait tout à fait aux vues des ultra-conservateurs. Cette marche-arrière est à mes yeux significative. Elle démontre aux populistes qu’il y a des marques à ne pas dépasser. L’émancipation des femmes est un exemple. Elles ne se laisseront pas pas refouler par rapport aux hommes. C’est une évolution qui me semble irréversible. Les populistes l’ont bien compris. Ce n’est pas sans raison qu’à la tête du gouvernement polonais se trouve une femme ou que Marine Le Pen soit aux commandes du FN. C’est une évolution dont il faut prendre compte. Ce qui s’est passé au parlement à Varsovie est un compromis, peut-être même un pas en arrière afin de sauter plus loin dans la radicalisation de la société. Dans ce cas-là ce serait une victoire de Pyrrhus que de croire que le danger totalitaire soit ainsi écarté. Jaroslaw Kaczynski, qui a les rennes en main, est malheureusement un tacticien rusé. Il sait parfaitement qu’il a ainsi marqué des points. Sans l’apport des femmes son mouvement ne peut pas subsister. Il faut s’attendre que dans d’autres domaines, les restrictions augmenteront, ce qui ne présage rien de bon pour l’avenir. Il a déjà muselé la presse, imposé des prérogatives réduites dans le domaine constitutionnel et ceci au dépend des libertés. L’opposition serait bien conseillée de se méfier au plus haut point et de ne rien laisser passer.

Les manifestations dans la rue ont démontré que la démocratie pouvait encore jouer. Mais attention ! Il faut éviter à tout prix qu’un État policier s’instaure de plus en plus. C’est la raison pour laquelle les juristes devraient passer au crible toutes les décisions. Il faudra aussi contrôler si les nouvelles lois correspondent avec les règles européennes. On ne peut pas être membre et ne tenir aucunement compte des options communautaires. Le cas de la Grande-Bretagne est un bon exemple. Il est impossible d’avoir le beurre et l’argent du beurre. Malgré les grand coups de gueules des dirigeants polonais, ils savent bien qu’ils profitent tant au point de vue économique et politique de Bruxelles. La renaissance du nationalisme russe les oblige de ne pas brusquer trop les alliés, que cela soit au sein de l’UE ou de l’Otan. Je pense que Jaroslaw Kaczinski en est parfaitement conscient et que malgré l’antipathie que j’ai pour sa politique, il fera tout pour ne pas rompre les ponts. C’est de la realpolitik dans le sens le plus pragmatique. Il clamera à tout le monde que le nationalisme est son berceau, mais ce dernier serait obsolète s’il devait y avoir une agression quelle que soit sa forme. Un blocus économique, comme cela est le cas actuellement pour la Russie, serait du poison pour la Pologne. Cela pourrait être le cas s’il subit la tentation de suivre l’exemple du Royaume-Uni. Non, trop de chemin a été fait pour jouer ainsi au poker. La population semble le reconnaître petit à petit et devra bien accepter la réalité. Il n’y a pas d’autre alternative.

pm

http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/10/06/pologne-le-parlement-rejette-la-proposition-de-loi-interdisant-totalement-l-avortement_5009162_3214.html

Pierre Mathias

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