Sur le terrain l’intervention russe en Syrie n’a pas fait évoluer la situation. L’IS n’a pas été affaibli. Seul Baschar el-Assad profite de cet engagement. Cela me donne des cauchemars, d’autant plus que chaque jour supplémentaire de guerre civile incite les populations à se réfugier en Europe. Entre l’effet médiatique et la réalité stratégique, il y a un grand fossé. Ne nous faisons pas d’illusions, sans la participation de troupes au sol, rien ne bougera. Jusqu’à présent les bombardements ont touché avant tout des innocents. Bien sûr, il y a des positions armées des fous de Dieu qui ont été détruites, mais la force militaire de ces rebelles n’en est pas moins encore plus que virulente. Vouloir mener le combat contre des guérilleros avec des armes conventionnelles est plus ou moins une hérésie. L’exemple de l’Afghanistan en est la preuve. Nous assistons malgré des années de guerre à une recrudescence des talibans. Ces derniers attaquent et se retirent instantanément dans des régions montagneuses, hostiles à toute intervention classique. Il y a en plus la détermination des combattants à sacrifier leur vie et ceci sans compromis. Comment vouloir arrêter des personnes qui sont prêtes à se laisser sauter ? La motivation des soldats venant d’ailleurs ne fera jamais obstacle au fanatisme. On est sur une longueur d’onde totalement différente. Je doute que les forces russes en Syrie aillent au-delà de l’engagement actuel. Vladimir Poutine a obtenu ce qu’il voulait: le renforcement de son implantation dans cette région, qui a pour but de redonner à son pays un poids politique au niveau internationale.

Cela peut aussi masquer en partie ses visées hégémoniques et forcer l’Occident à négocier avec lui. Cela ne pourra se faire que si les sanctions économiques soient rendues caduques. Cela sera le prix à payer. Un coup de maître. L‘ Est ukrainien restera autonome et la Crimée ne rentrera pas au bercail. Pour moi il ne fait aucun doute que si nous voulons « pacifier » la Syrie, l’Irak et les autres pays menacés par l’EI, il ne sera pas possible de faire autrement. Il y a aussi un autre élément de taille : celui de la menace islamique en Russie. Elle est omniprésente et risque de faire couler encore beaucoup de sang. L’EI est dans ce contexte un adversaire directe de Vladimir Poutine. Je vois en partie l’engagement russe aussi sous cet aspect. C’est la raison pour laquelle je ne comprends pas, que son aviation semble ménager son ennemi le plus directe. Serait-ce un aveu d’impuissance ? Que le Président ne se fasse pas d’illusions, il ne peut pas avoir de compromis avec les fondamentalistes. Il ne se laisseront pas acheter, leur but étant de déstabiliser toutes les nations « incroyantes », de détruire ce qui reste de démocratie en Russie par exemple. C’est là que le calcul risque de ne pas aboutir. Vouloir arrêter l’érosion avec des armes, ne sera jamais la solution. Ne nous faisons pas d’illusion, les islamistes des républiques caucasiennes feront régner la terreur afin de provoquer leur scission avec Moscou. Même si cela devait arriver, la menace de d’un démembrement total ne peut pas être écarté. Il faut que nous nous fassions une raison, les ultras musulmans ont le vent en poupe, que nous le voulions ou non.

pm

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/10/29/syrie-malgre-l-appui-des-frappes-russes-le-regime-ne-parvient-pas-a-prendre-l-avantage_4799681_3218.html

Pierre Mathias

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