À 93 ans, Oskar Gröning se retrouve à la barre du tribunal de Lunebourg pour complicité de 300 000 meurtres aggravés. Il était comptable à Auschwitz, où il devait faire en sorte que « les biens confisqués » aux juifs ne soient pas détournés. Pour veiller à la bonne marche du vol organisé, l’ancien SS était présent quand les trains de la mort arrivaient dans le camp de concentration. Notamment ceux venant de Hongrie, où presque toute la communauté israélite fut gazée. Personnellement il est avéré que l’accusé n’a pas participé à l’extermination, mais il a laissé faire, ce qui aux yeux de la justice pourrait être considéré comme un délit majeur. Le tribunal décidera ! Je trouve ce procès essentiel pour la législation future concernant le génocide. Si Oskar Gröning était reconnu coupable, il faudrait jeter un regard sur tous ceux qui par leur passivité permettent l’exécution de tels actes. Lorsqu’il y a une ratonnade causée par des sentiments racistes, les témoins assistant à de tels méfaits devraient intervenir. S’ils ne le font pas, ils devraient être considérés comme complices, même s’ils n’ont pas été à l’origine d’un tel lynchage. Cela revient à dire que chaque citoyen porte une responsabilité.
Il en est de même pour tous ceux qui n’ont pas réagi lors de la déportation des juifs, des gitans ou des homosexuelles dans les années noires de l’occupation en France. Le gouvernement de Vichy a suivi à la lettres les ordres des nazis et les a exécuté. Dans ce cas bien précis, les questions de culpabilités sont évidentes. Mais qu’en est-il des citoyens qui dans leurs immeubles ou dans la rue ont détourné leurs regards, lorsque la Gestapo ou la Milice intervenaient ? Ils devraient être rendus responsables de non-assistance à personnes en danger, si on suivait à la lettre les lois déjà existantes à cette époque. Même si de telles razzias ont été légalisées par le gouvernement en place, elles n’en sont pas pour le moins acceptables, au contraire. Chacun devrait en être conscient et prêt à en porter les conséquences. Dans un tel contexte il y a une responsabilité collective. En ce qui concerne Oskar Gröning, le cas est différent. Il a rejoint volontairement les rangs des Waffen-SS en 1940 et a été muté à Auschwitz en 1942. La demande de rejoindre une unité combattante ne lui a pas été accordée. Déjà à cette époque il ressentait des remords mais malgré ses scrupules, il est resté sur place. C’est la raison pour laquelle il est tout à fait légitime qu’il porte une responsabilité morale de ce qui s’est passé. C’est qu’il a dit lors de l’ouverture du procès et lors des décennies passées à la presse. Un refus catégorique de soutenir le négationnisme, comme beaucoup de responsables l’ont fait. Le procès de Nuremberg a démontré la lâcheté de la plupart des dignitaires du nazisme. C’était aussi le cas d‘ Adolf Eichmann à Jérusalem. Il n’a fait qu’exécuter les ordres, sans réfléchir à ce qu’il faisait ? Le comble du cynisme ! Lorsqu’on entend de telles déclarations, il est évident que la désobéissance envers le pouvoir peut être considéré comme un acte civique. Et ceci même si on est accusé de traîtrise. L’horreur ne peut pas fonctionner sans l’apport populaire ! Les criminels de guerre le savent parfaitement. D’où leur but de pervertir les populations, comme le pratique aujourd’hui l’État islamique. Rien n’a changé !
pm
http://www.lemonde.fr/europe/article/2015/04/22/proces-d-oskar-groning-le-comptable-d-auschwitz-demande-pardon-aux-victimes_4620244_3214.html