Bernard Cazeneuve, le ministre de l’intérieur, veut rendre les frontières de l’espace Schengen plus imperméables. Ce sera chose faite, tout au moins sur le papier. Sûrement une mesure justifiée par les événements, mais je doute fort qu’il sera ainsi possible d’éradiquer le terrorisme. Les derniers attentats ont démontré que le danger venait avant tout de l’intérieur, que bon nombre de terroristes vivent chez nous. Ce sera bien entendu un moyen d’arrêter certains d’entre-eux qui ont passé un séjour en Syrie ou ailleurs. Mais ne nous faisons pas d’illusions, il est impossible de garder d’une manière efficace des milliers de kilomètres de frontières. Il y aura toujours des accès imprévisibles. Mais l’UE se devait d’agir, déjà pour calmer tous ceux qui préconisent son éclatement. La sécurité est un des arguments phares des populistes, qui voudraient construire des murs autour de leurs pays et renvoyer les étrangers, qu’ils considèrent comme des éléments perturbateurs. Lorsqu’ils clament qu’ainsi il serait à nouveau possible de vivre dans la quiétude, ils mentent. Lorsque les contrôles étaient plus rigoureux, la situation n’était guère différente qu’à l’heure actuelle.
Je comprends parfaitement les craintes qu’on peut avoir en ce qui concerne le fondamentalisme et ses retombées dévastatrices, mais de là à mettre en place des états policiers, il y a un pas qu’il ne faudrait pas franchir. N’oublions pas que le but de l’État islamique ou d’Al-Qaïda est de nous déstabiliser, de rendre la démocratie et la liberté individuelle caduque, de nous pousser à la délation. En résumé rendre notre vie quotidienne insupportable. En jouant leur jeu nous restreignons notre espace de vie. Au cours de l’histoire européenne un tel scénario a démontré ce que cela peut amener. Le terrorisme d’État est la forme la plus vile en ce qui concerne notre société. Sous le couvert de l’ordre, d’innombrables crimes ont été commis, mais comme ils ont été légalisés, ils n’ont pas été considéré comme tels. Ceci jusqu’au jour où le régime s’effondre. Le temps de discriminer et d’assassiner des millions de personnes et ceci toujours avec l’argument qu’un « peuple sain » a le droit de se défendre. Il faut donc à tout prix éviter de tomber dans une telle logique. Les dérives sécuritaires ne sont pas à exclure. La police doit certes faire son travail, mais elle ne doit restreindre les libertés qui sont notre raison de vivre. Il faut bien entendu lutter contre tous ceux qui veulent nous anéantir, mais ce n’est pas en nous enfermant dans des principes discriminatoires que nous serons efficaces. Il faut à tout prix préserver nos acquis démocratiques. En les remettant en question, nous nous nions, ce qui n’est pas acceptable. Lorsque on sait qu’à Londres des caméras observent 24 heures sur 24 la population, je me pose des questions. Je ne peux plus faire un pas sans qu’on le sache. Est-ce la forme de société que j’appelle de mes vœux ? Non, je la rejette ! Mais cela ne veut pas dire que je refuse plus de contrôles aux frontières de l’espace Schengen si cela peut restreindre les dérives policières au sein de nos pays. Mais je sais aussi que cela sera guère évitable. Aucun ministre de l’intérieur veut se voir reproché d’avoir agit d’une manière laxiste. L’excès de zèle sera plutôt de mise ! CQFD !
pm
