Lorsqu’on voit des centaines de personnes – nombre d’entre-elles ne sont pas des alpinistes – vouloir atteindre le somment de l’Everest, on ne peut que secouer la tête. Onze personnes sont mortes, la plupart par manque d’oxygène. Lorsque j’ai vu cette photo, cela m’a fait penser aux scènes qu’on voit avant l’ouverture des grands magasins un jour de soldes. Mais avec la grande différence que personne avance. Un embouteillage ! Je me suis décidé d’écrire quelques lignes à ce sujet, car je trouve ce qui se passe actuellement au Népal est symbolique pour notre époque. Vouloir braver la destinée sans avoir les moyens de la faire. Un défi qui souvent ne rime à rien. Et puis l’attrait du business. Pour les autorités locales l’occasion de faire de l’argent. Il faut compter environ 10.000 dollars de taxes pour se payer ce plaisir ! 8 848 mètres d’altitudes comme attrape-nigauds. Ce qui se passe là-bas est absurde. La preuve que le dit sensationnel prend le pas sur la raison. L’hécatombe de morts qui s’amorce à alerté le gouvernement. Il est question d’autoriser l’accès au plus sommet du monde qu’à ceux qui sont en bonne santé et qui ont l’expérience de la montagne. Lorsque l’homme prend de tels risques, c’est pour moi un signe qui avoisine le suicide. Vouloir braver ainsi la mort, démontre que bien des personnes ne savent plus à quels saints se vouer. Galvauder ainsi sa vie peut partir de l’ennui, de la banalité de la vie, lorsque seul le matérialisme la domine. Le vide prend alors une telle importance, que certains sont prêts à mourir pour pouvoir jouir d’une telle sensation, celle d’un sacrifice ultime, non pas pour aider autrui, mais pour vaincre un sentiment de médiocrité. J’ai aussi été attiré par la magie des sommets, mais heureusement que j’étais trop inexpérimenté pour atteindre le but que je m’étais fixé. J’avais le souffle trop court pour tenter le diable. J’ai passé mon enfance à deux pas du Mont Blanc et sais parfaitement quelle fascination la haute-montagne peut exercer. Mais j’ai aussi vu des touristes décrocher sur le glacier des Bossons, car ils étaient mal équipés. Des amateurs qui mettent en danger les guides, qui ont le devoir de les sauver.

Contrairement à beaucoup, je pense que pas seulement le pragmatisme doit guider notre existence. Que des rêves insensés doivent pouvoir être réalisés. Mais là il y a aussi des limites qui ne doivent pas être dépassées. Si le rêve consiste à se retrouver dans une masse de gens qui n’arrivent plus à avancer à quelques centaines de mètre du sommet de l’Everest, c’est de la démence. Je pense que la vie est un bien trop précieux, pour la risquer ainsi. En plus ce qui me gêne considérablement, c’est la démystification d’évènements qui devraient être réservés qu’à des passionnés. Banaliser l’ascension des sommets de l’Himalaya me gène. C’est pour moi la fin d’un rêve, d’une épopée réservée qu’à des personnes voulant défier l’impossible. Si tout devient accessible, pourquoi vouloir encore tenter l’impossible. S’il n’existe plus, il n’y a plus qu’à désespérer. Je pense que l’homme a besoin de tels mythes pour pouvoir ce surpasser. En faire du tourisme de masse est à mes yeux une atteinte à l’esprit de compétition, aux défis que chacun d’entre-nous a besoin pour se surpasser. Bref, la victoire de la médiocrité !

pm

https://www.lemonde.fr/planete/video/2019/05/31/au-sommet-de-l-everest-comment-les-embouteillages-deviennent-des-pieges-mortels_5470057_3244.html

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