Lorsque Madame Le Pen se plaint qu’on ait violé son droit à la liberté d’expression et de pensée, pour avoir comparé en décembre 2010 les prières de rue des musulmans à l’occupation nazie pendant la seconde guerre mondiale, elle est de mauvaise foi. Elle devra s’expliquer à ce sujet le 20 octobre devant le tribunal correctionnel de Lyon. J’avais tourné il y a longtemps un reportage, où je donnais la parole à un éditeur de Berlin, qui avait imprimé un livre de Robert Faurisson, le négationniste, interdit de publication en France. En prétendant qu’Auschwitz était une légende, il s’était mis en touche en blessant l’âme des survivants, qu’il traitait ainsi de menteurs. Lorsque je voulus savoir pourquoi le comité de lecture n’avait pas eu de scrupules à donner le feu vert à une telle publication, le directeur me donna les mêmes raisons que celle de la présidente du FN. Pour lui la liberté d’expression primait sur toutes les autres considérations. À ses yeux il était parfaitement légitime de publier des thèses avérées fausses. C’était à l’auteur de prendre ses responsabilités, non à la justice d’interdire de tels agissements. Un argument souvent employé pas l’extrême-droite pour justifier des paroles discriminatoires. De telles personnes oublient que l’État à le devoir de protéger tous ceux qui sont attaqués d’une manière vile et que les lois édictées interdisent de blesser l’honneur des minorités.
Marine Le Pen avait tout loisir de s’en prendre aux prières dans les rues, mais la comparaison avec l’occupation allemande ne pouvait pas se justifier. Soit dit en passant, ce n’est pas par provocation que de tels rassemblements se déroulent souvent le vendredi, mais par manque de mosquées. Je trouve pour ma part que de telles déclarations doivent être condamnées, même si la question de la liberté de pensée peut être posée. La justice fait bien de faire remarquer qu’il y a des limites qu’il ne faut pas dépasser. Dans un tel contexte, la brouille entre père et fille me semble être plutôt suspecte. La « Présidente » se devrait d’être exemplaire, si elle veut être crédible. Elle ne l’est pas, au contraire. Les voix antisémites et racistes ne se sont pas tues dans son parti. La polémique prend souvent des aspects nauséabonds, en s’attaquant à l’intégrité des opposants. Vouloir se faire passer pour une martyre me semble être hors-propos. Elle ne peut pas prétendre être discriminée. En mettant au pilori des croyants en manque de lieux de prières, en les assimilant à des assassins nazis, elle blesse leur intégrité avec des attaques qui ne correspondent pas à la réalité. Le débat politique peut être rude dans le ton, mais il ne devrait jamais propager des contre-vérités comme c’est le cas ici. Les Le Pen sont passés maître dans l’art de la polémique. Pour un bon mot, ils n’hésitent pas à s’attaquer à l’honneur d’un nombre non négligeable de citoyens. Comme par hasard ils sont plutôt basanés et ont, du fait de leur situation sociale, du mal à se défendre. Mais peu importe la lâcheté, si de telles diatribes sont approuvées par une majorité silencieuse de gens soi-disant respectables. La liberté d’expression ne peut que subsister tant que le respect d’autrui est respecté. Qu’elle le veuille ou pas, Marine Le Pen n’en a pas tenu compte.
pm
