Jacques Attali prend la défense des « sans bureau ». Il s’agit de salariés qui n’ont plus de places fixes dans une entreprise. D’après lui cela nuit à l’identité d’une firme et n’est pas très motivant pour les personnes concernées. Il ne cite par contre pas les avantages que de telles mesures peuvent pas avoir comme la présence d’une mère auprès de ses enfants ou la liberté de pouvoir organiser personnellement son travail. Mais gérer son emploi du temps n’est pas évident. Cela implique une grande discipline ! J’en sais quelque chose. Pendant des années j’ai été directement concerné. Qu’est-je pu constater ? Sans une structure rigide, j’aurais trouvé toujours des excuses pour ne pas effectuer le programme imparti. Finalement le rythme de ma journée n’était guère différent. Début de mes activités à 9 heures, une pause entre midi et une heure, fin de travail à… C’est là que les horreurs peuvent commencer. En principe toutes personnes responsables font volontairement des heures supplémentaires gratuites pour éviter tous reproches d’en faire trop peu. Et il n’y a pas toutes les interruptions consacrées au bavardage dans les couloirs avec les collègues, pas de fêtes d’anniversaire ou « des discussions soit disant professionnelles à la cantine ». La pause cigarette passe évidemment à la trappe.

La stratégie des patrons consiste à augmenter la capacité de travail sans l’imposer. Ils sont les bénéficiaires. Sous le couvert d’une plus grande liberté, ils attendent plus de rigueur de la part de leurs employés. N’y a-t-il rien de plus efficace que lorsque les salariés s’exploitent eux-mêmes ? Puis il a aussi une autre volonté, celle d’affaiblir le rôle des syndicats. La solidarité en prend un sacré coup. Si les rapports entre les salariés sont de plus en plus futiles, il est très difficile de mener à bien des revendications salariales ou logistiques. « Tu es ton seul patron ! Tu travailles à la carte et ceci dans une ambiance familière. » Un leurre ! Combien de dimanches étais-je rivé à ma table de travail pour respecter les obligations que je m’étais fixées ? En introduisant un système où il est possible de louer un bureau à la journée, l’entreprise fait des économies immobilières. Mais dans un tel calcul elle ne fait pas cas des atouts de la communication. C’est une différence de rencontrer des collègues au cours de séances de travail ou d’avoir un contact non prévu par le management. J’ai constaté au cours de ma vie professionnelle que beaucoup de projets ont vu le jour « en passant ». La rencontre d’un collègue, parler de tout et de rien, puis tout à coup un éclair, une idée qu’on communique directement sans se servir de skype ou tout autre outil électronique. Un défi au virtuel, où une certaine structure est programmée d’avance. Une déclaration de guerre à l’improvisation, ce qui est à mon avis une hérésie. En fin de compte cela va au dépend de la créativité. Puis il y a aussi le problème de la solitude. Le home office implique un certain silence, un retour sur soi-même. L’empathie en prend un sacré coup ! Une fois de plus les moins favorisées sont les femmes. Elles doivent constamment être disponibles, ce qui implique de moins en moins de temps libre. Lorsqu’elles vont au bureau, personne ne peut les forcer à mener de fronts deux activités : le métier et la famille. Jacques Attali a probablement raison.

pm

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Pierre Mathias

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