Alexeï Navalny, le principal opposant de Vladimir Poutine aux élections présidentielles de 2018, n’aura pas le droit de se présenter, car la justice l’avait condamné pour une question de détournement de fonds. D’après lui, une affaire montée de a à z, afin de ne pas mettre en danger le président actuel. Il serait, d’après le verdict, inéligible jusqu’en 2028. L’éviction arbitraire de ce juriste de 41 ans est à mon avis montée de toutes pièces. Il est difficile de comprendre cette démarche du Kremlin, d’autant plus que le président semble être assuré de la victoire. Il serait en tous les cas bon, que la Russie se dote enfin d’un système vraiment démocratique. Des élections truquées ne sont dignes que des républiques bananières. Vladimir Poutine gagnerait de la grandeur en se soumettant à un vote équitable. Il est étrange que la peur domine dans ce cas-là. Alaxeï Navalny demandera à ses adeptes de boycotter ces élections. Que lui reste-t-il d’autre à faire. L’impression prévaut que cette démarche du pouvoir ne gênera qu’une partie infime des citoyens. Ce sera avant tout l’élite intellectuelle qui sera touchée. La question qui se posera pour nous, c’est de savoir jusqu’à quel point un tel régime sera crédible ? Ce ne sera pas à nous, les nations démocratiques de l’Occident, à donner des leçons à cette grande puissance. Cela ne m’étonnerait pas que Donald Trump ne protesterait que du bout de ses lèvres. Je pense que nous sommes entrés dans une époque, où un certain totalitarisme prendra de plus en plus d’importance. La recherche d’un leader charismatique, pouvant régler les problèmes d’un coup de baguette magique, augmentera avec le temps. Est-elle due à un rejet d’un système dominé par la technologie ? D’une technologie qui n’a pas de visage ? L’homme n’a-t-il pas le besoin de s’agripper à du concret ?
Toute la stratégie électorale du Président se base sur un culte de la personnalité. Les photos ou les vidéos que le Kremlin propage, montre un Poutine faisant de la chasse, pêchant à torse nu, faisant de l’équitation ou s’intéressant aux arts. La présentation d’un être en chaire et en os, qui veut ainsi montrer de la proximité. Mais aussi de la virilité. Un homme de poigne, qui ne s’en laisse pas imposer. Peut-être l’archétype de l’homme providentiel qui se préoccupera des intérêts de ses compatriotes, qui les aidera à surmonter leurs problèmes. Finalement un modèle du passé, qui, à en croire l’histoire, a eu souvent des lendemains guère glorieux. Un peuple qui accepte un autocrate, démontre à quel point il est en manque de sûreté, qu’il est loin de vouloir s’assumer. Aurait-on affaire à un nouveau tzar ? Je crains fort que cette comparaison ne soit pas erronée et qu’elle décrit bien la réalité. C’est un peu le même phénomène qui s’est passé aux États-Unis avec l’élection de Trump. Bien des personnes sont prêtes de signer un chèque en blanc, car elles ont l’impression d’aller à la dérive. Une situation des plus propices pour tous autocrates. Pour les électeurs qui se prêtent à ce jeu, la démocratie fait désordre. C’est justement l’argument qu’utilise les populistes pour gagner des voix, avec succès comme le prouve les derniers exemples venant de Vienne ou de Varsovie.
pm