Mon père, comme certains de mes collègues, vécurent dans l’illusion qu’ils étaient immortels. Pour eux il n’y avait aucun doute qu’ils pourraient être actifs jusqu’à leur dernier souffle, que jusqu’à l’ultime heure de leur vie, ils pourraient subvenir par leur travail à leurs besoins et ceux de leurs familles. Mon père rendit l’âme à 66 ans après maintes années de maladie. Ma mère dut aller travailler, car la rente de son mari ne suffisait pas à assurer son ordinaire. J’ai connu au cours de ma vie professionnelle des gens étant dans la même situation. Ils n’avaient pas envisagé qu’ils pourraient se trouver sur une voie de garage et que la précarité viendrait empoisonner leur vieillesse. En France, un tiers des seniors vivaient en 2015 sans emplois et retraites. Selon une étude publiée le 19 septembre par la « Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques » (Drees), un service rattaché à trois ministères (solidarités, travail, comptes publics), 1,4 millions d’individus âgés de 53 à 69 ans, soit 11 % de cette tranche d’âge vivent au-dessous du seuil de la pauvreté. Leurs maigres revenus sont issus « des minima sociaux, des allocations-chômage ou des pensions d’invalidité », selon la Drees. La baisse de l’âge de la retraite a accélérer cette tendance. Comme il fallait s’y attendre, les femmes sont surreprésentées. Elles représentent les deux tiers des effectifs. Trois personnes sur dix sont en mauvaise santé et ne peuvent pas, même si elles le voulaient travailler. C’est particulièrement tragique, parce que la couverture sociale ne suffit pas de faire le joint entre un arrêt anticipé de l’emploi et la retraite. Weiterlesen